EN QUÊTE DE FLOW
NOVEMBRE 2020
Pour fêter le déconfinement, Samuel Bellenoue, entraîneur du Groupe COFIDIS a offert à son coureur Guillaume Martin un petit séjour en chambre Hypoxie au CNEA de Font-Romeu. Cette initiative s’inscrit dans une stratégie de préparation au Tour de France et aux JO 2021. Fraîchement recruté par COFIDIS, nous avions échangé avec Samuel Bellenoue en 2019 en repérage au CNEA sur sa vision de la performance
Un article publié récemment sur Ouest France nous explique la stratégie de Guillaume Martin:
Par Christophe Richard – Ouest France – 02 Mai 2021
L’Ornais de Cofidis entamera dès ce lundi un cycle de travail de trois semaines en altitude, dans les Pyrénées puis dans les Alpes. Un travail indispensable pour un candidat au Tour de France.
Les Ardennaises terminées, les cyclistes peuvent désormais plus sérieusement se concentrer sur le Tour de France. C’est le cas de Guillaume Martin (27 ans) qui, après un hiver contrarié (douleurs aux genoux, chute en stage), vient de couper une semaine.
« J’étais en bonne forme mais les résultats me laissent un goût d’inachevé (16e de l’Amstel Gold Race et de la Flèche wallonne, 15e de Liège-Bastogne-Liège) . Et comme mon hiver a été perturbé, je n’ai pas l’impression d’être usé. J’aurais eu les moyens d’enchaîner sur un Tour d’Italie par exemple. »
La découverte du Giro attendra (« Pourquoi pas l’année prochaine ? ») en raison des ambitions du leader de Cofidis sur le Tour et les Jeux olympiques (la semaine suivant l’arrivée à Paris). Place donc à un stage de trois semaines en altitude, passage obligé pour un prétendant au classement général ou à une victoire d’étape sur la Grande Boucle.
Direction les massifs français
Guillaume Martin prendra la direction demain de Font-Romeu (Pyrénées-Orientales) pour une première semaine à son initiative avant d’enchaîner les deux suivantes à Isola 2000 (Alpes-Maritimes) avec Cofidis.
« D’un point de vue logistique, et en raison du Covid, il est plus simple de rester en France. » Le Normand ne s’envole donc pas direction Tenerife et le volcan Teide, prisé par certaines équipes. « L’équipe vient également de signer un partenariat avec Isola 2000. Et le cuisinier de l’équipe, Lionel Le Mer, y tient son restaurant. »
Auparavant, la semaine à Font-Romeu sera l’occasion de faire les reconnaissances des étapes pyrénéennes du Tour de France. « Les créneaux sont rares dans une saison. Si je voulais faire un stage pour travailler en altitude et un autre pour des reconnaissances d’étape, il n’y aurait pas assez de jours dans l’année. »
Un stage en altitude, ça sert à quoi ?
Si les cyclistes se rendent en altitude, parfois pour plusieurs semaines, ce n’est pas pour la beauté des paysages. Et pas seulement pour travailler le coup de pédale de la montagne, comme pourrait le penser un néophyte. L’objectif est avant tout physiologique afin de dégager un gain une fois de retour à la compétition.
« Le but est de s’exposer à un air raréfié en oxygène , explique le grimpeur. C’est une forme d’agression pour le corps, qui se crée des défenses et s’habitue à travailler avec un apport moindre en oxygène. Quand on est de retour au niveau de la mer, il y a un phénomène de surcompensation. Et le corps est alors plus à même de faire des efforts. »
S’entraîner en bas, dormir en haut
Pour y parvenir, l’important n’est pas tant de rouler en altitude que d’y vivre. « On dit : s‘entraîner en bas, dormir en haut. Même si ce n’est pas aussi simple que ça. » En effet, un stage en altitude ne s’improvise pas. Et Guillaume Martin peut profiter d’un soutien de poids, celui de Samuel Bellenoue, son entraîneur, un spécialiste de la question.
« Il m’a guidé et m’a permis d’éviter de faire de grosses erreurs. Il ne faut pas faire trop d’intensité, surtout au début car une phase d’acclimatation est nécessaire. Il faut faire attention à bien boire car on a tendance à être plus déshydraté. Et enfin, il ne faut pas limiter les apports en glucides, comme on le fait parfois pour perdre du poids, au risque de ne plus avoir assez d’énergie. »
Surtout quand on se mélange dans les vallées… Une mésaventure connue par le Normand. « Lors d’un stage à Tignes, j’avais fait une erreur de parcours lors d’une reconnaissance d’étape du Dauphiné. La sortie avait duré 7 h 15 au lieu de 5 h 30, je n’avais pas prévu assez de nourriture. Avec les 5 € dans ma poche, je m’étais arrêté dans une boulangerie pour avoir le plus de calories possible. Depuis, je fais attention d’avoir assez d’argent ou de nourriture. »
Sprints et hypoxie
Ces stages en altitude sont des moments attendus par Guillaume Martin, dont les premiers remontent à 2014 alors qu’il était encore dans les rangs amateurs. « Ce sont de longues plages d’entraînement, un luxe dans la saison, où l’on pousse mais sans en faire trop. On y fait des sorties longues, à faible intensité. Je travaille aussi des sprints à très haute altitude. Cela a des effets, même pour les grimpeurs… Ce sont des moments où je sais que je peux travailler sereinement. Et je sais que je progresse grâce à ces stages. »
Un autre levier utilisé par l’Ornais est la chambre hypoxique. Une installation qui lui permettra, à Font Romeu, de simuler une altitude de 2 500 m (contre 1 800 m pour la station) et donc de stimuler davantage son corps. En revanche, il n’utilise pas de tente hypoxique le reste de l’année, comme le font certains. « Elles ne sont pas aussi efficaces et imposent de rester dans son lit. »
Une bulle au cœur de la saison
Ce stage en altitude est une parenthèse après le premier bloc de courses de la saison. Un moment de calme relatif, sans la pression du résultat et des sollicitations. Un moment de solitude pour commencer à Font-Romeu, où Guillaume Martin pourra en profiter pour prendre la plume. « Même si je suis là pour beaucoup rouler, j’ai parfois le temps d’écrire. »
Les deux semaines à Isola 2000 seront, elles, l’occasion de varier les routes. Mais aussi de passer du temps avec ce qui constituera une partie de la garde rapprochée du Normand lors du Tour de France.
« Anthony Perez, Simon Geschke et Ruben Fernandez seront là, peut-être Pierre-Luc Périchon. Il y a forcément une dimension cohésion à se retrouver aussi longtemps ensemble. Sans le stress de la course, on développe des liens plus facilement. » Les derniers, ou presque, avant l’excitation provoquée par le Tour de France.